Aux portes de la rue : les sortants de la protection de l’enfance

Régulièrement cité comme un public spécifique dans les différents documents et instances cadres de la politique du logement et de lutte contre la pauvreté, les sortants d’institutions ne font pourtant que rarement l’objet d’études plus approfondies.

Face à ce constat et devant l’ampleur de la représentation de ce public parmi les personnes mal-logées, la Fondation Abbé Pierre a choisi de traiter, dans son 24e rapport sur l’état du mal-logement en France, le sujet des ruptures de parcours subies par les sortants d’institutions. Après avoir traité en 2015 le sujet des ménages « aux portes du logement » (Recherche Sociale n°212), il s’agit ainsi aujourd’hui d’évoquer ceux qui se retrouvent au contraire « aux portes de la rue » après une prise en charge en institution.

FORS-Recherche Sociale a contribué à la réalisation de cette étude thématique qui constitue le premier chapitre du rapport de la Fondation Abbé Pierre en 2019. Trois publics en particulier ont été ciblés dans le cadre de cette étude : les sortants de détention, les sortants d’hôpitaux notamment psychiatriques et les sortants de la Protection de l’Enfance. (…) Ce numéro de Recherche Sociale, qui constitue le premier volet d’une série sur ces trois publics, cible celui des sortants de la Protection de l’Enfance.

Placés à la suite d’importantes difficultés familiales, de nombreux jeunes pris en charge par la Protection de l’Enfance connaissent ensuite plusieurs foyers, familles d’accueil ou lieux de vie, ces placement étant entrecoupés pour certains par des aller-retour avec le domicile familial. Leur prise en charge prend fin à la majorité (ou au plus tard à 21 ans), de façon à la fois précoce, brutale et globale.[1]

Vécue comme un véritable abandon par les jeunes et les professionnels qui les accompagnent, la fin de la prise en charge de la Protection de l’Enfance mène de nombreux sortants à des situations très précaires, voire à l’errance. Ainsi, 26% de l’ensemble des sans-domiciles nés en France et 36% de ceux de 18 à 25 ans ont eu un parcours en Protection de l’Enfance. S’ils peuvent en partie être expliqués par les contextes familiaux difficiles dans lesquels nombre de ces enfants grandissent, ces chiffres interrogent également sur ce moment de rupture que constitue la fin du placement.

Au travers de nombreux témoignages de professionnels de la Protection de l’Enfance, du logement et de l’hébergement ainsi que de sortants de la Protection de l’Enfance, cette étude analyse les parcours de ces jeunes puis s’intéresse aux causes de leurs difficultés ainsi qu’aux mécanismes qui alimentent les ruptures caractérisant la fin de leur prise en charge. Enfin, en valorisant différentes bonnes pratiques, cette étude présente des propositions permettant d’améliorer l’accompagnement les jeunes lors de la sortie de la Protection de l’Enfance et de favoriser leur accès à un logement stable.

 Alice Best

FORS-Recherche sociale

[1] DULIN, Antoine, « Prévenir les ruptures dans les parcours en Protection de l’Enfance », CESE, 2018.